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Le mariage royal au sein d’une famille anglaise

Comme trois millions d’être humains dans le monde, si l’on en croit la presse anglaise, j’ai regardé le mariage du Prince et de la Princesse à la télévision, chez des amis. Etre une Française en Angleterre a rendu l’expérience particulièrement intéressante. Les femmes romantiques ne peuvent s’empêcher d’admirer le rêve de l’ histoire d’amour parfaite, comme elles l’imaginaient enfants. Les cyniques commentent et s’amusent. La robe, superbe, l’abbaye, impressionnante, la pompe anglaise, unique.

Avec des amis dont les prénoms sont autant de rois et reines, d’Arthur à Victoria, de James à Richard, il est vrai que mon monde anglais est privilégié. Je ne savais pas jusque là à quel point certains sont royalistes. Regarder quelques moments, d’accord, mais regarder la journée entière, l’enregistrer et recommencer m’a paru quelque peu exagéré. Nous avons porté un toast aux nouveaux mariés que nous ne rencontrerons jamais avec du Champagne, des larmes ont discrètement embuées quelques yeux peu maquillés et quelques connaissances ont été reconnues dans la congrégation de Westminster.

Je n’avais aucune envie d’être dans l’abbaye, je ne les connais pas. Je n’aurais jamais passé plusieurs nuits à camper devant le Palais, l’Abbaye ou quelque part sur le chemin du cortège royal le coeur plein d’espoir. Ce n’est pas ma famille royale. Je n’étais pas une fillette anglaise lorsque Lady Di est devenue la femme la plus photographiée du monde. Comprendre l’intérêt et l’attachement d’un peuple à sa famille royale pour une femme qui a passé son enfance dans une république et sa vie adulte dans cette royauté est fascinant.

Les enfants montrent bien que les hommes viennent de Mars et les femmes de Vénus. Les garçons étaient bien plus intéressés par les jeux vidéos et parlaient bien trop fort au gout des filles. Prince William avait peut être un beau costume, ce n’était pas celui dans lequel il se roule dans la boue, ou plus exactement, co-pilote un hélicoptère et sauve quelques vies au passage.

Dans le camp des adultes, les hommes commentaient un peu trop fort au goût des femmes qui voulaient entendre les commentaires des présentateurs de la télévision. Une de mes amis avait imprimé l’ordre du jour. Elle savait à quelle heure les bagues allaient être échangées, le bisou sur le balcon offert aux photographes, qui mangeait dans quel palais ou quel hôtel.

Les hommes et les photographes ont préféré la petite balade en Aston Martin. Les pères fanas de voiture se disant que ce serait beau de voir leur fils au volant de leur décapotable. Il faut reconnaitre que la DB6 Volante de Prince Charles est superbe. Qui plus est elle a été convertie pour utiliser un bioconbustible (apparemment à partir de vin anglais, mais bon, ils ne font pas beaucoup de kilomètres au volant de leur propre voiture dans la famille royale).

Une fois le court bisou sur le balcon passé, pardon les deux bisous, nous étions enfin libres de commencer le barbecue. Les hommes devant le feu, les femmes préparant une belle table, les enfants dans le parc. La journée redevenait normale même si le sujet de conversation du jour était prévisible et que nappes, serviettes et assiettes étaient autant d’Union Jacks et que sur les murs, les drapeaux à l’effigie du couple royal nous regardaient d’un oeil vide.

Il ne faut pas penser pour autant que tous les Anglais adorent la famille royale. Beaucoup ont évité à tout prix toute idée de mariage. Des amis ont empruntés des chiens pour se perdre au milieu d’un bois le plus loin possible de la télévision et la radio. Certains pensent que les dépenses royales sont trop astronomiques par rapport à la valeur économiques qu’ils rapportent au pays au contraire de ce qui disent les médias qui, sans aucun doute, gagnent beaucoup d’argent grâce à la famille royale. Il est dans leur intérêt d’imprimer des pages de photos des familles royales pour faire rêver ceux qui n’auront jamais de telles robes, des voitures décapotables à la James Bond ou une église assez grande pour planter des arbres dans la nef.

Le jour du rêve est passé, nous revoilà dans la réalité anglaise journalière. Les drapeaux vont rentrer au placard, Prince Charles n’est toujours pas roi. Il y a beaucoup d’espoir placé sur les jeunes épaules du couple, beaucoup voient Prince William comme le seul qui pourra sauver la monarchie d’une désintegration inévitable. Bon courage. Ce n’est ni parti gagnée, ni balade dans le parc.

Arrêt patriotique prochain: les jeux olympiques. L’engouement est moins évident. De royalisme à autodérision, il n’y a qu’un pas anglais et ils font les deux à merveille.

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Le mariage royal anglais vu de la campagne du Sud-Ouest

Le monde entier parle du mariage du Prince William et Kate Middleton. La robe, la pompe, les touristes, les millions de spectateurs, les milliers de livres dépensés et les millions de livres de revenus pour les compagnies anglaises qui ont su bien vite capitaliser sur l’événement.

Mais pour les Anglais dans le fin fond de la campagne du Dorset Occidental, ça change quoi cet événement? Tout dépend des Anglais. Tout d’abord, c’est un jour de congé. Bon début. D’autant que le premier lundi de Mai est toujours férié voici un second week-end de quatre jour, après Pâques. Employés ravis, employeurs un peu moins.

Les Britanniques sont assez fans de leurs drapeaux. Pluriel voulu, car j’entends par là les drapeaux anglais, écossais ou gallois. Nous disons peut être la reine d’Angleterre, même si elle est la couronne non seulement du Royaume Uni et du Commonwealth, mais le drapeau Britannique n’est devenu à la mode que récemment. Il est vrai que la folie du Union Jack avait déjà commencé avec les Jeux Olympiques de Londres 2012, mais le mariage royal a permis aux fabricants de tasses, assiettes, tapis, chaussures, lunettes de soleil, sacs, habits ou banderoles de s’en donner à coeur joie. Si les artistes et designers s’y sont mis et que le public suit en achetant des produits patriotiques, vous imaginez les enfants dans les écoles.

Mon fils de 10 ans a reçu une tasse commémorative (tasse de thé, pas de café bien sur). Non pas un cadeau de sa mère qui n’y aurait même pas pensé mais de l’association de parents d’élèves de son école. Tout d’abord, j’ai franchement trouvé cela très bizarre. Puis, ayant proposé de prendre des photos pour la postérité, je me suis mise au jeu. Tous vêtus en bleu, blanc, rouge (nous sommes au moins unis par nos couleurs patriotiques) ils ont mangé des gâteaux sur le gazon de leur cour de récréation, les petites de maternelle dans leurs belles robe du dimanche (pas d’uniforme de l’école pour l’occasion) me montrant la princesse sur leur tasse, avec des sourires épanouis. Elle casseront peut être la tasse, mais elles se souviendront de cette journée.

Ma campagne est bien rurale mais nous sommes tout de même au 21eme siècle et j’ai donc reçu des invitations facebook. La première, de notre cinéma local l’Electric Palace à Bridport qui va montrer l’événement sur le grand écran. Prosseco (le champagne est trop cher) et gâteaux sont de la partie, belles fripes et chapeaux sont en option, mais recommandés. J’ai décliné. La seconde a eu plus de commentaires mais comme toujours, ceux qui râlent parlent plus fort que ceux qui conforment. La  ‘diffusion alternative du mariage royal’ montrera les images mais sera commentée par des comédiens. J’avoue que je suis tentée.

Ceci étant dit, j’ai été invitée à une Garden Party. Un barbecue quoi. Email à tous les invités, chacun emmène quelque chose. Vues les réponses, mes amis anglais sont plus royalistes que je ne l’imaginais. Mon amie Victoria (j’aurais du m’en douter vu son nom) a dévalisé les magasins. Assiettes, serviettes, nappes, drapeaux, banderoles et autres gadgets pour les enfants. Les Union Jack vont nous sortir par les oreilles.

Quelque part, je ne crois pas que je pourrai regarder la version alternative. Mais bon, j’adore une bonne petite fête et je ne doute pas qu’on va bien s’amuser. C’est une excuse comme toute autre, même si particulièrement anglaise. Depuis plus de vingt ans que j’habite en Angleterre je n’ai rien connu de tel. C’est sur qu’il y a plein d’Anglais qui ne sont pas intéressés, certains passent même le weekend à l’étranger sans télé, internet ou radio. Je crois que ce n’est qu’une bonne excuse pour être le râleur cool du coin. Il n’y a pas que les Français qui aiment râler.

Guillaume et Catherine sont jeunes, ils se marient, j’espère qu’ils seront heureux. Rendront-ils la monarchie un peu plus populaire? Dieu seul sait.

Dieu et mon droit.

Oyez! Oyez! Les Anglais ont 220 crieurs publics

et ils commencent souvent leur harangue par ces mots, parvenus en Angleterre par le biais de notre cher Guillaume le Conquérant en 1066.

La renaissance des crieurs

Tout comme en France les crieurs publics avaient disparus avec l’arrivée des journaux. Dans les années 80, il y a eu en Grande-Bretagne un engouement pour les films d’époque et une certaine nostalgie pour le bon vieux temps, alors que le pays se transformait sous la main forte de la dame de fer.

Ceci étant dit, les Anglais adorent se déguiser. Point. Toute excuse pour se parer de costumes d’époque, même si l’audience n’est que de quelques dizaines de villageois, est bonne. Les crieurs n’ont peut être pas d’énormes chapeaux en fourrure comme les Gardes Royaux (heureusement pour les ours) mais ils ont un tricorne et s’habillent de façon à ce qu’on les remarque.

Qui dit crieur dit ville

Au début 2011, la Grande-Bretagne compte 220 crieurs publics. Ils sont en fait des ‘crieurs de ville’ et ne peuvent s’appeler town criers que ceux qui sont reconnus par leur mairie. Ils appartiennent à l’Ancienne et Honorable Guilde des Crieurs de Ville. Certains crient pour plusieurs villes. La plupart crient en privé aussi, pour arrondir les fins de mois. En fait, ils sont souvent volontaires, à la retraite et ce sont les événements privés qui leur permettent de continuer à crier.

Notre crieur local, David Craner (town crier pour Beaminster et Crewkerne), dont la voix porte fort loin, essaie de trouver des sponsors pour venir présenter ce ‘métier’ quelque peu bizarre et pourtant si vieux à nos petits écoliers par le biais de l’association de jumelage.

Crierons nous plus en France?

Moi je dis bravo. Dans notre monde ou les ordinateurs envahissent notre vie sociale sans que nous nous en rendions compte, requinquer une tradition de recevoir des nouvelles de vive voix me plait bien.

Fast-food a fait naître slow-food, peut être que les crieurs publics, éteints par les journaux, vont faire renaitre les nouvelles. ‘Live’, pour de vrai.

Oyez! Oyez! Oyez!

Une vallée perdue dans le Dorset Occidental

Les petits coins perdus dans le Dorset Occidental, c’est pas ce qui manque. On peut aller par monts et par vaux prendre une petite route et se retrouver au milieu de nulle part. Il y aura peut être une ferme protégée par une colline ou un hameau aux maisons de pierre locale, avec un peu de chance un toit en chaume ou deux.

Entre Beaminster et Bridport, il y en a plein des petits détours de chemin comme ça. Ce weekend, j’ai redécouvert un hameau au nom de Loscombe. Sachant que ‘combe’ veut dire petite vallée et que ‘lost’ signifie perdu, on est pas vraiment étonné de se retrouver au milieu de nulle part, entouré de collines. Tous les ans mes amis Loscombois (les Anglais ne sont pas aussi friands que nous de donner des noms aux habitants de toutes les communes donc j’invente) invitent les copains, leurs enfants et leurs chiens à une grande balade pour annoncer le printemps.

Nous voilà partis, les enfants pressés courent avec les chiens devant et les parents bavardent tout en regardant la campagne environnante. On s’arrête pour écouter le ruisseau qui gargouille et arrose les perce neiges, un peu tardifs cette année. Il fait d’ailleurs encore froid mais le soleil est de la partie en ce début de Mars et la journée est magnifique. Le long du cours d’eau sous les arbres, on peut sentir l’ail sauvage qui sort à peine de terre mais ne passe pas inaperçu.

Après les vaux viennent les monts, et nous attaquons une colline. Petites dans la famille des monts, les collines du coin sont assez raide dans la catégorie balades. Les enfants se régalent de rouler du haut en bas et les parents récupèrent leur souffle en admirant le paysage. Les couleurs d’hiver ne sont pas vert, vert et vert comme on imagine toujours Angleterre.

Devant nous, les collines semblent s’encastrer les unes dans les autres, laissant deviner les petites vallées cachées. Les arbres n’ont pas encore de bourgeons et les fines branches semblent avoir esquissé des croquis d’ombre sur le sol ensoleillé. Seuls les aulnes ont leurs fleurs d’hiver jaunes comme de minuscules lave bouteilles. Des buissons endormis parsèment les flancs des collines et donnent un peu de couleurs brunes au paysage.

Le calme complet des vallons du Dorset est un peu envahi aujourd’hui par tous ces enfants et leurs chiens en laisse et les parents qui causent. De retour dans la cour du cottage, une excellente soupe chaude, du bon pain frais, un plateau de fromages du coin et quelques bouteilles de bière et de vin nous attendent. Nous nous installons sur les chaises et les bottes de paille pour reprendre notre souffle et savourons ce soleil d’hiver qui réchauffe si bien.

Finalement notre petite vallée voisine n’est pas perdue pour tout le monde. Une journée de plaisir pur et simple. Difficile à battre.